LA MADONE DE BRANDO
Ou l’histoire d’un tableau sauvé par la passion d’un grand collectionneur au XIXème siècle.

 
DE BAECQUE et Associés se réjouit du retour en Corse de la Madone de Brando près de 200 ans après son acquisition par Albin Chalandon en 1839.

Le retour sur l’ile de Beauté de ce fleuron du patrimoine Corse a été rendu possible par notre médiation avec la mairie de Brando et la collectivité de Corse qui a permis d’éviter un long contentieux.

La domanialité publique de ce tableau était très contestable compte tenu de la particularité de sa provenance et des éléments nombreux et parfaitement documentés sur les circonstances de sa vente dont nous avons précisément étudié les implications juridiques.

Nous étions prêts à accompagner nos clients pour défendre cette position en justice, ce qui aurait été passionnant du point du vue du droit public, mais long, coûteux et finalement contraire à l’intérêt de toutes les parties.

La négociation d’une juste indemnité transactionnelle a permis de convaincre les propriétaires actuels de renoncer à leur droit de propriété au profit de la commune de Brando. Nous avons favorisé cette transaction qui est une solution intelligente, efficace et équilibrée permettant de ne retenir que la partie la plus positive de cette histoire : le rôle extraordinaire d’un grand collectionneur et de sa famille pour la redécouverte et la préservation d’une œuvre oubliée depuis près de 200 ans !

C’est en effet l’achat par Albin Chalandon puis la longue transmission familiale qui ont sauvé ce retable. Rappelons que suite à la vente du tableau par la paroisse en 1839, avec l’accord du maire de Brando et de l’évêque, le préfet avait décidé de valider cette transaction mais d’interdire toute vente future des autres tableaux entreposés par les paroissiens. Malheureusement, nous ne savons plus rien de tous ces tableaux qui ont tous disparu.

C’est donc la passion d’un collectionneur qui a permis en 1839 de sauvegarder en l’achetant, une œuvre que personne ne regardait à l’époque et qui est aujourd’hui admirée comme un exceptionnel témoignage du patrimoine Corse.
Outre la discussion juridique, il aurait donc été particulièrement injuste que les propriétaires actuels se retrouvent spoliés de la propriété de ce tableau alors que c’est grâce à eux que cette œuvre a été sauvegardée avec son toute son histoire et sa provenance détaillée.

Nous sommes heureux d’avoir participé à cette belle histoire depuis la redécouverte du tableau, et d’avoir provoqué grâce au travail de médiatisation un vrai sursaut pour défendre cet élément remarquable du patrimoine Corse.

Les collectionneurs, les commissaires-priseurs et le marché de l’art en général participent ainsi à la sauvegarde du patrimoine par leurs découvertes.
Simone DA FIRENZE et Rocco (Rocho) DI BARTOLOMMEO (Peintres florentins travaillant en Ligurie vers 1500)
La Vierge en trône tenant l'Enfant, entourée de quatre anges musiciens dite la Madone de Brando
Panneau de retable, rectangulaire
Peinture mixte sur fond d'or guilloché, sur panneaux de bois, cadre en bois sculpté et doré gothique avec arcades polylobées retombant sur des colonnettes torses et surmontées de gâbles.

Inscriptions dans le coin inférieur gauche du panneau, en lettres classiques tracées à la peinture noire sur parchemin ou papier déchiré en trompe-l'oeil : "OPUS SIMONE PIT[…] /ET ROCHO FI[…]/ADI XI DAPRI[lis]/A[nno]D[omini] M.CCCC[c]" H. 198cm - L. 94,8cm avec cadre 

Fentes au panneau visibles.
Le tableau a été restauré par E.C. Daussigny (1805-1878) peintre, écrivain et conservateur du musée de Lyon. Actuellement, la surface picturale présente des soulèvements, principalement au niveau de la jonction des planches et dans le manteau de la Vierge.
Au revers, présence de deux traverses en bois modernes et traces de deux traverses anciennes placées à contre-fil. Numéro 45 tracé à la peinture noire. Fond d'or et ornementation poinçonnée d'origine.

Provenance :
-Couvent San Francescu de Castello, Brando, Corse (construit en 1474, abandonné et ruiné après la révolution)
-Fabrique paroissiale de Brando, par suite de l'affectation des biens des églises supprimées par le décret du 30 mai 1806 .
-Collection Albin Chalandon (1809-1885) acquis auprès de la précédente en 1839
-Puis par descendance collection privée, Paris.

Expositions :
J .B. Giraud, "Recueil descriptif et raisonné des principaux objets d'art ayant figuré à l'exposition rétrospective de Lyon 1877", 1878, p.5, le panneau y est décrit sous le numéro 152.

Bibliographie :
Sur le panneau de la Madone voir :
L. Demonts, op.cit. infra, p.248, comme École vénitienne vers 1500.
G. Algeri, A. de Floriani, "La pittura in Liguria, Il Quattrocento", 1992, p. 431, fig.396, n.53 suiveur de Giovanni Mazone.
O. Lavino, « Ricomposizioni per Simone da Firenze », in Arte Cristiana, 919, 7/8 2020, p. 280-303.

Sur la collection Chalandon voir :
G. Migeon, La collection de Monsieur Georges Chalandon, Les Arts, Juin 1905, p. 20.
L. Demonts, Une collection française de Primitifs, Revue de l'Art Ancien et Moderne, LXX, 1936, p. 247- 250.
J. F. Garnier, Le goût du Moyen-Age chez les collectionneurs lyonnais du XIXe siècle, Revue de l'Art, 1980, n°47, p. 53-64, p. 58.
D. Thiebaut, Berenson, Sassetta ...et la France, Renaissance studies in Honor of Joseph Connors, The Harvard University Center for Italian Renaissance Studies, Villa I Tatti, 2013, p. 702-713.