Adjugé 25 000€ lundi 17 novembre 2014

Werner SCHOLZ (1898-1982)
"Der Streit" (la dispute)
Huile sur carton, monogrammée et datée (19)30 en bas à gauche
Titrée et datée au dos, porte une étiquette : "Streit n° 30 " et une étiquette " Musée de Lyon, exposition Scholz 1970 "
H. 75 cm L. 74,5 cm PhG

Provenance :
Galerie Fricker, Paris

Exposition :
" Werner Scholz" catalogue d'exposition, Musée des Beaux-Arts de Lyon, 16 décembre 1970 - 31 janvier 1971, reproduit sous le n° 15, planche 5

Bibliographie :
Hans-Georg Gadamer, "Werner Scholz", édition Aurel Bongers, Recklinghausen, 1968, " Streit 1930 " reproduit page 28, pl. 10


Né à Berlin en 1898, Werner Scholz commence ses études aux Beaux-Arts en 1916 mais doit les interrompre brutalement à cause de sa mobilisation à 18 ans. Il est gravement blessé sur le front français et perd son avant-bras gauche, arraché par un obus, en même que ses dernières illusions. Les horreurs vécues, les douleurs éprouvées lors de la guerre, le chaos et la misère sociale allemande ressentis à Berlin durant l'entre-deux guerres, lorsqu'il reprend ses activités artistiques, transparaîtront largement dans son oeuvre en noir et blanc. " L'art lui sert avant tout à extérioriser ses sentiments, à communiquer ses angoisses, ses inquiétudes tragiques, sa révolte".
Le centre incontesté de l'expressionnisme devient Berlin autour de Grosz, Dix, Beckmann et Werner Scholz. Ce dernier fait partie intégrante de cette ville qui tangue entre frénésie de vivre et désintégration d'un monde révolu. Il y est né et l'investit, portant sur son environnement un regard accusateur, sans concession, mais sans cruauté. Il peint ce qu'il voit : la faune des noctambules, les boîtes de nuit, la rue, la pauvreté, le chômage, les révoltes, les déshérités, les prostituées, les mendiants...et les enfants. Des enfants sans rêves dans une vie sans joie minée par la misère et les conflits sociaux.
Le style pictural est en tension, il est puissant et volontaire, les traits sont aigus, les tons assourdis, souvent cernés. " Scholz a un sens profond de l'attitude (...) qui donne à ses personnages, bien qu'immobiles et souvent esquissés, une véritable explosion de force expressive ".
En 1930, il participe à une exposition collective à Berlin et rencontre Emil Nolde qui lui achète une peinture et qui contribuera beaucoup à éclaircir sa palette. Il se fait remarquer des collectionneurs et des musées allemands qui acquièrent de nombreux tableaux.
En 1937, les nazis le classent dans la catégorie des artistes dits " dégénérés " en même temps que tous les autres grands peintres expressionnistes. Ses oeuvres sont alors retirées des musées et confisquées. La situation politique est telle qu'il doit quitter Berlin et part se réfugier dans les montagnes du Tyrol autrichien. Année après année, cet exil forcé agira pourtant sur lui comme un baume cicatrisant. Ses obsessions et ses angoisses se calmeront au contact d'une nature majestueuse qu'il représente fréquemment, ses oeuvres seront plus apaisées et une certaine sérénité transparaîtra même sur les visages qu'il continue de peindre.
Lors du bombardement de Berlin en 1944, son atelier est détruit et la quasi-totalité de son oeuvre d'avant 1939, conservée clandestinement, disparaît sous les décombres. En 1946, une première grande exposition (et la première en Allemagne depuis 1933) lui sera consacrée, sous le patronage du Gouvernement militaire français et de la ville de Constance. Hans-Georg Gadamer lui dédiera un important ouvrage en 1968 et la galerie Fricker contribuera à faire connaître cet artiste exceptionnel, l'un des peintres majeurs de l'expressionnisme allemand.

Bibliographie :
Préface de Jacques Fricker dans le catalogue de l'exposition " Werner Scholz ", Musée des Beaux-Arts de Lyon, 16 décembre 1970 - 31 janvier 1971

Muriel Le Payen