XU BEIHONG (1985-1953) AUX ENCHÈRES À PARIS LE 14 JUIN

DE BAECQUE & Associés annonce la vente aux enchères d’une œuvre de l’artiste chinois XU Beihong (1895-1953), Cheval dans la montagne, 1938, le vendredi 14 juin à Drouot. Estimée 300 000 – 400 000 €, cette œuvre provient par descendance du diplomate Henri Maux, restée dans sa famille jusqu'à ce jour.


XU Beihong (1895-1953), figure majeure de la peinture chinoise moderne dans la première moitié du XXème siècle est connu pour ses encres figurant des animaux, dont des chevaux qui font sa réputation. L’artiste fait partie de la première génération de peintres chinois formés à l'école des Beaux-Arts à Paris. Son oeuvre évolue mêlant les méthodes ancestrales chinoises de l’encre aux techinques occidentales apprises en Europe. Revenu en Chine, l’artiste devient, entre autres, un professeur réputé qui a pu former et influer une nouvelle génération de peintres en Chine.

Acquise en 1947 à Nankin, du vivant de l’artiste, par le diplomate Henri Maux, cette œuvre est restée dans sa famille jusqu’à ce jour.

Haut fonctionnaire français, Henri MAUX (1901-1950) exécute de nombreuses missions diplomatiques en Asie, sous le gouvernement de Chiang Kai-shek qu’il rencontre à l’été 1939. Son travail sur place est reconnu par le gouvernement qui le décore de l’Ordre du Jade. Poursuivant ses missions en Asie depuis Chongqing, puis Shangaï ou encore Hong Kong, Henri Maux marque l’histoire de la diplomatie franco-chinoise.
Henri Maux meurt prématurément dans un accident d’avion en juin 1950. L’état français lui décernera la Légion d’honneur à titre posthume.
Son oeuvre de Xu Beihong, acquise à Nankin en 1947, est installée dans l’appartement parisien des Maux à l’été 1949 et ne quittera jamais la famille. Elle sera conservée par sa veuve, Hélène, puis par sa fille cadette, souvenir de cette vie en Asie et de leur mari et père.
   

  
XU Beihong 徐悲鴻 (1895-1953)
Cheval dans la montagne
Encre et couleurs sur papier
Inscrit « Sans titre », daté « début de l’automne 1938 (wuyin) », et signé Beihong avec un sceau de l’artiste (Donghai wangsun) en haut à gauche
Encadré sous verre
Mesures : 103,5 x 49

Inscription :
無題
戊寅新秋 悲鴻

Provenance : Achetée en 1947 par Monsieur Henri Maux (1901-1950) à Nankin.

Estimation sur demande 



Henri Maux (1901-1950)
   
 
Ingénieur et diplomate, Henri Maux a œuvré sans relâche durant une période mouvementée en Chine et en Asie et a été décoré par la Chine et par la France.

Polytechnicien du corps des Ponts et Chaussées coloniaux, Henri Maux est affecté en Indochine en 1927, où il supervise la création d’une ligne de train (Cambodge) et de travaux hydrauliques (Cochinchine).
En 1937, il est envoyé comme conseiller technique dans une mission de la Société des Nation auprès du gouvernement chinois, dirigé par Chiang Kai-shek (Jiang Jieshi). Malgré le déclenchement de la guerre sino-japonaise en novembre 1937, il va réaliser de nombreuses inspections des routes, ponts et voies ferrées, sillonnant les routes des provinces du Sud-Ouest de la Chine (Hunan, Guangxi, Guangdong, Guizhou, Sichuan et Yunnan), entre les villes d’Hanoï, Hankou, Changsha, Canton, Hong Kong, Guilin, Guiyang, Kunming, et Chongqing, et rendre ensuite des rapports au gouvernement chinois. Il fera même la route de Kunming jusqu’à Rangoon en Birmanie. Henri Maux travaille en étroite collaboration avec des ingénieurs, responsables locaux et ministres du gouvernement chinois, en particulier avec T.V. Soong (Song Ziwen). Il rencontre Chiang Kai-shek en personne à l’été 39 à Chongqing, et rentre en France en août.

Son implication dans cette tache ardue et son travail rigoureux, très appréciés, lui vaudront d’être décoré de l’ordre de Jade (Caiyu Xunzhang 采玉勳章 ) en 1941 par le Ministère des Affaires Etrangères chinois (Waijiao bu). Son nom chinois est Mu He 穆和. (ci-contre)
Réclamé par la Chine, il y est renvoyé avant même la fin de la Seconde Guerre Mondiale, en mars 1945, pour oeuvrer à une reprise des échanges. Il rencontre T.V. Soong, alors Premier Ministre (jusqu’en 1947) pour définir les besoins de la Chine en importations et reconstructions,        puis rentre à Paris pour travailler à la création, qui a lieu en novembre 1945, de la Mission Economique Française d’Extrême-Orient, MEFEO, dont il est nommé chef. La MEFEO est basée à Shanghai, mais Henri Maux fait de fréquents voyages à Nankin, où s’est réinstallé le                  gouvernement de la République de Chine et les diplomates : il y déjeune en septembre 1946 avec la délégation communiste, formée de Zhou Enlai et deux adjoints. Henri Maux travaille à faciliter les échanges commerciaux et industriels entre la Chine et la France, permettant                notamment des livraisons riz indochinois vers la Chine, le développement de la première liaison aérienne Saïgon – Shanghai, et celui de lignes de chemin de fer.

En juillet 1947, le gouvernement français l’envoie à New-York, pour assister Mendès-France à l’ONU, durant les négociations du Comité Economique et Social de l’ONU sur la question de l’Extrême-Orient. L’ONU crée la Commission Economique pour l’Asie et l’Extrême-Orient, dite      ECAFE (Economic Commission for Asia and the Far-East), et Henri Maux est nommé à la tête de la délégation française de cette commission. De 1947 à 1950 il siègera et prendra la parole à toutes les conférences de l’ECAFE (aux Philippines, en Inde, en Australie, à Singapour, et à    Bangkok). Il rapproche sa famille en installant sa femme et ses filles dans une maison à Hong Kong en haut du Victoria Peak début 1948. L’avancée des communistes annonce la chute du gouvernement nationaliste, Henri Maux retourne pour la dernière fois à Shanghai et Nankin en      janvier 1949, sa famille rentre s’installer en France l’été 1949.

Henri Maux meurt prématurément en juin 1950 dans un accident d’avion à Bahreïn au retour de la conférence de l’ECAFE à Bangkok.
L’état français lui décernera la Légion d’honneur à titre posthume.

La peinture de Xu Beihong, acquise à Nankin en 1947, est installée dans l’appartement parisien des Maux à l’été 1949 et ne quittera jamais la famille. Elle sera conservée par sa veuve, Hélène, puis par sa fille cadette, souvenir de cette vie en Asie et de leur mari et père.



XU Beihong (1895-1953)

Né à Yixing au Jiangsu, il débute l’étude de la calligraphie et de la peinture traditionnelle chinoise enfant auprès de son père, peintre lui-même. Il commence à travailler tôt comme enseignant et peintre. Il s’installe à Shanghai entre 1914, y intègre l’université Aurore où il étudie le français, puis part au Japon en 1917 pour étudier les Beaux-Arts. Il y observe comment les artistes japonais ont assimilé les techniques de la peinture occidentale, et comment, pense-t-il, elles peuvent revivifier la peinture chinoise.

A son retour il enseigne à l’Université de Pékin et publie un article à ce sujet. En 1919 il obtient une bourse et part étudier en France (il étudiera aussi à Berlin), et intègre les Beaux-Arts à Paris en 1923, où il étudie le dessin (occidental) et la peinture à l’huile. Il fait partie de cette génération d’artistes chinois partie se former en France dans l’entre deux guerre comme Lin Fengmian, Pan Yuliang, et bien d’autres. Une grande exposition de ses œuvres à Shanghai en 1926 le fait connaître en Chine. A son retour en 1927, il enseigne la peinture à l’Université Central Nationale à Nankin, et va en devenir le directeur du département des Beaux-Arts. Dans les années 30 il organise des expositions itinérantes présentant les jeunes peintres chinois à travers l’Europe, il expose aussi ses œuvres en Asie du Sud-est, au profit de l’effort de guerre. Après la guerre, en 1946 il est nommé directeur de l’Institut des Beaux-Arts de Beiping (Pékin), et puis en 1950 celui de l’Académie Centrale des Beaux-Arts.

Dans les débats de l’époque sur l’avenir de la peinture en Chine, Xu défend le réalisme, plutôt que l’idéalisme ou le formalisme plus expérimental. Ses œuvres peuvent cependant montrer un aspect héroïque ou didactique (proche du réalisme académique vu en France). Il promeut aussi l’importance de l’apprentissage rigoureux du dessin, même pour pratiquer ensuite le médium traditionnel de l’encre sur papier. Les idées de Xu Beihong vont exercer une forte influence sur l’enseignement (et donc sur l évolution) de l’art en Chine au XXe siècle.

La peinture de cheval a une histoire ancienne en Chine, certains grands peintres étaient ainsi spécialisés et reconnus pour leurs peintures de chevaux, tels Han Gan sous la dynastie Tang (618-907) ou Li Gonglin (XIe siècle) sous les Song. Si Xu Beihong a peint toutes sortes d’animaux, c’est sans doute pour ses chevaux qu’il est le plus célèbre. Souvent ses chevaux galopent libres sur un fond blanc, sans contexte ou arrière-plan. Ici, non seulement le cheval est inséré dans un paysage, mais ce dernier est vaste et dramatique. Le cheval se dresse fièrement, crinière au vent, seul au bout d’un éperon rocheux très élevé, face à deux pins, et presque acculé mais la tête haute. On devine l’immense vide qui l’entoure grâce aux hauts pics montagneux visibles dans le lointain. Au début de l’automne 1938, lorsqu’il peint cette oeuvre, Xu Beihong a suivi son université déplacée à Chongqing au Sichuan : suite aux avancée des japonais sur le territoire, le gouvernement chinois et toutes les universités et institutions de Chine se sont repliées dans cette ville de l’intérieur, une langue de terre tout en hauteur entourée par le Yangtse et la rivière Jialing.
Il voyait peut-être en ce cheval une image de la Chine, acculée en position difficile durant la guerre, et faisant face.

Informations sur la vente :
MOBILIER ET OBJETS D'ART - TABLEAUX - SCULPTURES
Vendredi 14 juin 2024 - 14h
Hôtel Drouot - Salle 5

Exposition publique :
Mercredi 12 juin de 11h à 18h
Jeudi 13 juin de 11h à 20h
Vendredi 14 juin de 11h à 12h

Pré-exposition sur rendez-vous à Paris :
10 rue Rossini 75009 Paris
paris@debaecque.fr 

Expert : Léonore de Magnée


English version
XU Beihong 徐悲鴻 (1895-1953)
Horse in the moutain
Ink and colour on paper (framed), inscribed « No title », dated « early autumn 1938 (wuyin) » and signed « Beihong » with one seal of the artist, « Donghai wangsun », in the upper left hand corner.
103,5 x 49 cm

Inscription :
無題
戊寅新秋 悲鴻

Seal :
東海王孫

Provenance : Purchased in 1947 by Henri Maux (1901-1950) in Nanjing.

Henri Maux (1901-1950)
Both engineer and diplomat, Henri Maux worked relentlessly in troubled times in China and Asia and was awarded the Order of Brilliant Jade by China and the National Order of the Legion of Honour (Légion d’Honneur) by France.
A graduate of the prestigious Ecole Polytechnique and Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, Henri Maux was posted to Indochina in 1927, where he oversaw the creation of a railway line (Cambodia) and hydraulic works (Cochinchina). In 1937, he was sent as a technical advisor on a League of Nations mission to the Chinese government, headed by Chiang Kai-shek (Jiang Jieshi). Despite the outbreak of the Sino-Japanese war in November 1937, he carried out numerous inspections of roads, bridges and railroads, criss-crossing the provinces of Southwest China (Hunan, Guangxi, Guangdong, Guizhou, Sichuan and Yunnan), between the cities of Hanoi, Hankou, Changsha, Canton, Hong Kong, Guilin, Guiyang, Kunming and Chongqing, and reporting back to the Chinese government. He even went to assess the road from Kunming to Rangoon in Burma. Henri Maux worked closely with engineers, local officials and Chinese government ministers, in particular with T.V. Soong (Song Ziwen). He met Chiang Kai-shek in person in the summer of 39 in Chongqing, and returned to France in August. His dedication to this arduous task and his rigorous work was much appreciated, and earned him the Order of Jade (Caiyu Xunzhang 采玉勳章 ) in 1941 from the Chinese Ministry of Foreign Affairs (Waijiao Bu). His chinese name was Mu He 穆和.
As requested by China, he was sent back even before the end of World War II, in March 1945, to work on the resumption of trade. He rejoined T.V. Soong, then Prime Minister (until 1947) in Shanghai, to define China's import and reconstruction needs, then returned to Paris to work on the creation, in November 1945, of the French Economic Mission for the Far-East or MEFEO (Mission Economique Française d'Extrême-Orient), of which he was appointed head. The MEFEO was based in Shanghai, but Maux made frequent trips to Nanjing, where the government of the Republic of China and its diplomats had resettled: in September 1946, he lunched with the Communist delegation, made up of Zhou Enlai and two deputies. Maux worked to facilitate trade and industrial exchanges between China and France, enabling Indochinese rice deliveries to China, the development of the first Saigon-Shanghai air service, and the construction of railroad lines.

In July 1947, the French government sent him to New York, to assist Mendès-France at the UN, during the UN Economic and Social Committee negotiations on the Far East question. The UN created the Economic Commission for Asia and the Far-East (ECAFE), and Maux was appointed head of the French delegation. From 1947 to 1950, he attended and spoke at all ECAFE conferences (in the Philippines, India, Australia, Singapore and Bangkok). He brought his family closer by moving his wife and daughters to a house in Hong Kong at the top of Victoria Peak in early 1948. With the advance of the Communists heralding the fall of the Nationalist government, Maux returned to Shanghai and Nanjing for the last time in January 1949, and his family moved back to France in the summer of 1949. Henri died prematurely in June 1950 in a plane crash in Bahrain, on his way back from the ECAFE conference in Bangkok. He was posthumously awarded the Légion d'honneur by the French government.
Xu Beihong's painting, acquired in Nanjing in 1947, was installed in the Maux's Paris apartment in the summer of 1949, and never left the family. It was kept by his widow, Hélène, and later by his youngest daughter, as a memento of their life in Asia and of their husband and father.


XU Beihong (1895-1953)

Born in Yixing, Jiangsu, he began studying calligraphy and traditional Chinese painting as a child with his father, a painter himself. He soon began working as a teacher and painter. He moved to Shanghai in 1914, enrolled at Aurore University where he studied French, then left for Japan in 1917 to study Fine Arts. There he observed how Japanese artists had assimilated Western painting techniques, and how, he believed, these could revitalize Chinese painting. On his return, he taught at Beijing University and published an article on the subject. In 1919, he obtained a scholarship to France (he also studied in Berlin), and entered the Beaux-Arts in Paris in 1923, where he studied (Western) drawing and oil painting. He was one of a generation of Chinese artists who trained in France between the wars, including Lin Fengmian, Pan Yuliang and many others. A major exhibition of his work in Shanghai in 1926 made his reputation in China. On his return in 1927, he taught painting at the National Central University in Nanjing, eventually becoming head of the Fine Arts Department. In the 1930s, he organized traveling exhibitions of young Chinese painters throughout Europe, as well as exhibiting his work in Southeast Asia in support of the war effort. After the war, in 1946 he was appointed Director of the Beiping Institute of Fine Arts (Beijing), and in 1950 of the Central Academy of Fine Arts.
In the debates at the time on the future of painting in China, Xu defended realism, rather than idealism or the more experimental formalism. His works may, however, display a heroic or didactic aspect (close to the academic realism seen in France). He also promoted the importance of rigorous drawing training, even for subsequent practice in the traditional medium of ink on paper. Xu Beihong's ideas were to exert a strong influence on the teaching (and hence the evolution) of art in twentieth-century China.

Horse painting has a long history in China, with some great painters specializing and being recognized for their horse paintings, such as Han Gan under the Tang dynasty (618-907) or Li Gonglin (11th century) under the Song. Although Xu Beihong painted all kinds of animals, he is undoubtedly most famous for his horses. Often, his horses gallop freely on a white background, without any context. Here, not only is the horse inserted into a landscape, but the latter is vast and dramatic. The horse stands proudly, mane blowing in the wind, alone at the end of a high rocky spur, facing two pine trees, almost cornered but head held high. The immense emptiness that surrounds him can be made out by the high mountain peaks visible in the distance. In the early autumn of 1938, when he painted this work, Xu Beihong had followed his university to Chongqing in Sichuan: following the Japanese advances on the territory, the Chinese government and all China's universities and institutions had retreated to this inland city, a spit of high ground surrounded by the Yangtse and Jialing rivers. Perhaps he saw in this horse an image of China, cornered in a difficult position during the war, and facing up to it.